Cette année encore, l’inflation frappe l’ensemble de la population et en particulier les plus vulnérables. Y faire face nécessite de véritables augmentations de salaires et la fin de la boucle profits-prix qui alimente l’inflation.
Ce 26 octobre, l’Insee a publié l’indice des prix à la consommation (IPC) du mois de septembre. Le constat est implacable : l’IPC a encore augmenté de 4,9 % entre septembre 2022 et septembre 2023.
Des conséquences dramatiques pour les ménages… et l’économie tout entière
L’inflation reste forte, et elle frappe encore plus durement les personnes les plus modestes. En effet, plus les revenus sont faibles, plus la part consacrée aux dépenses du quotidien augmente.
Et ces dernières sont parmi les plus concernées par l’inflation : les produits de grande consommation (alimentation, hygiène, produits ménagers…) on augmenté de 10,3 % (9,7 % pour l’alimentation) et l’énergie de 11,9 % sur un an (16,1 % pour l’électricité).
Ces hausses de prix ont un effet catastrophique sur la vie des personnes, qui doivent se priver de loisirs voire de produits de première nécessité pour les plus pauvres, mais également sur l’économie tout entière .Cette baisse de la consommation constitue aussi un argument opportuniste pour les entreprises qui n’hésitent pas à le brandir pour ne pas augmenter les salaires (aggravant ainsi la situation) ou pour limiter les embauches.
Dans ses projections macroéconomiques de juin 2023, la Banque de France annonce 100 000 destructions nettes d’emploi en deux ans (malgré l’hypothèse très optimiste, voire improbable, d’un retour à 2 % d’inflation).
L’inflation pourrait enfin avoir un impact néfaste en matière de santé publique.
La hausse des prix alimentaires peut conduire les plus précaires à consommer des produits moins chers, de moindre qualité nutritionnelle, voire à sauter des repas. Le renoncement aux soins est également de plus en plus important et les mesures d’austérité qui frappent de plein fouet les services publics de santé font que ces derniers ne sont pas en mesure d’endiguer efficacement le risque sanitaire qui se profile.
Augmenter les salaires : la meilleure solution
Pour faire face à l’inflation, il faut augmenter les salaires. Les salaires bruts. Certains employeurs ont proposé des primes à leurs salarié·es – c’est d’ailleurs l’un des principaux axes du gouvernement dans sa loi du partage de la valeur.
Malheureusement, si elles peuvent, à l’instant T amortir la hausse des prix, leur effet s’estompe avec le temps, car les prix ne baissent pas et ces primes ne sont pas pérennes.
Pire : une prime comme la prime de partage de la valeur (“prime Macron”) n’est pas prise en compte dans le calcul des pensions ou des allocations-chômage. Un·e salarié·e qui perd son emploi ou part en retraite, aura une allocation chômage ou une pension de retraite qui ne prendra pas en compte ce type de rémunération volatile et non soumises à cotisations sociales.
L’État promet également des baisses d’impôts pour les entreprises et les travailleur·ses – surtout pour les entreprises d’ailleurs. Le gouvernement ne prévoit toutefois aucune mesure de compensation, affaiblissant des services publics déjà à la peine.
L’inquiétante baisse des salaires réels
La politique d’augmentations limitées des salaires a désormais des effets bien constatés : la baisse des salaires réels. Ainsi selon la DARES, le salaire mensuel de base a reculé en termes réels (corrigé de l’inflation) entre le deuxième trimestre 2021 et le premier trimestre 2023. L’INSEE fait la même analyse en prévoyant baisse des salaires réels moyens par personne de -2,8 % entre l’été 2022 et l’été 2023, et une nouvelle baisse du pouvoir d’achat des ménages de -0,8% pour les deux premiers trimestres 2023.
Si l’on parle d’augmentations salariales sans précédent en 2023, il ne faut pas s’y tromper : toute augmentation de salaire inférieure au taux d’inflation est une perte de salaire réelle.
Pour faire face à l’inflation, la CGT est porteuse de propositions, notamment :
- indexer les salaires sur les prix avec l’échelle mobile des salaires ;
- augmenter le Smic à 2 000 euros bruts par mois pour 32 heures hebdomadaires ;
- augmenter les minima de branches et garantir une échelle qui reconnaît les qualifications et permet de vrais déroulements de carrière ;
- augmenter tous les salaires dans l’entreprise : ouvrir dès l’automne partout des négociations sur des hausses générales de salaire.
L’égalité entre les femmes et les hommes, une priorité
L’égalité entre les femmes et les hommes, une priorité
Carrières hachées, temps partiels subis, métiers à prédominance féminine dévalorisés… Autant de raisons qui font qu’aujourd’hui encore les femmes gagnent 27 % de moins que les hommes, un phénomène qui s’amplifie à la retraite (leurs pensions sont inférieures de 40 % à celles des hommes). Près de 64 % des salarié·es au Smic sont des femmes.
Elles sont donc parmi les premières victimes de l’inflation. Gagner l’égalité salariale et professionnelle entre les femmes et les hommes est donc une priorité, et là encore la CGT est porteuse de nombreuses propositions :
- revaloriser les métiers à prédominance féminine ;
- réviser l’index égalité pour qu’il fasse toute la transparence sur les inégalités et sanctionner les entreprises qui discriminent ;
- créer de nouveaux droits et moyens pour prévenir et lutter contre les violences sexistes et sexuelles au travail et en dehors ;
- créer un service public de la petite enfance, de proximité financièrement accessible à tou·tes ;
- allonger le « congé de paternité et d’accueil de l’enfant » à quatre mois, intégralement rémunéré ;
- mettre fin aux temps partiels subis ;
- mettre fin aux systèmes opaques d’individualisation des rémunérations et des primes ;
- conditionner l’octroi des marchés publics à l’égalité salariale.
Pas de boucle salaires-prix, mais une boucle profits-prix
Aux augmentations de salaire nécessaires proposées par la CGT, gouvernement et patronat opposent l’argument d’une boucle salaires-prix : pour eux, augmenter les salaires forcerait les entreprises à reporter les hausses sur les produits vendus, et donc sur les consommateur·ices, augmentant de fait l’inflation.
Si cette boucle n’a jamais été démontrée, l’existence d’une boucle profits-prix est bien documentée. Dans un rapport publié en juin 2023, trois chercheur·ses du FMI indiquent que les profits des entreprises sont responsables de près de la moitié de l’inflation.
En effet, en cas d’inflation, les entreprises ont tendance à préserver leurs marges autant que faire se peut, et surtout les bénéfices de leurs actionnaires. En 2022, alors que l’inflation était de 2,9 %, les entreprises ont versé 80 milliards d’euros à leurs actionnaires, soit 15 % de plus qu’en 2021 (qui était déjà un record) ! Les salaires n’ont évidemment pas connu une telle évolution…
L’effet des profits sur l’inflation saute aux yeux lorsque l’on se penche sur la répercussion des prix de l’énergie. Dans une étude parue en mai 2023, les auteur·ices indiquent que « sur la période de 2018 à mi-2022, les entreprises répercutent seulement 58 % des baisses. Elles répercutent en revanche complètement, voire un peu au-delà (127 %), des hausses de coûts énergétiques […]. Une hausse des coûts de l’énergie suivie d’une baisse de même ampleur ne ramènerait donc pas les prix de vente à leur niveau initial. »
Ces éléments sont à mettre en perspective avec les nombreux cadeaux offerts par l’État au patronat : les aides aux entreprises représentent ainsi le premier poste de dépense publique, 200 milliards d’euros en 2019.
Sur ce sujet, la CGT porte encore des propositions ambitieuses :
- fin des trappes à bas salaires avec la suppression des exonérations de cotisations sociales ;
- création d’un comité national de suivi des aides publiques avec déclinaison régionales ;
- obligation de publication des données BDESE aides publiques sur les sites des entreprises ;
- conditionnement de l’octroi des aides publiques à des objectifs de relocalisation des productions, de
- réindustrialisation, de transition environnementale, d’augmentations de salaires, d’égalité femmes-hommes, d’emploi des seniors, de réduction du temps de travail ;
- interdiction des suppressions d’emplois ou des accords de performance collective dans les entreprises qui ont perçu des aides publiques pendant douze mois avec contrôle du CSE à l’issue de ce délai sur le stock d’emplois ;
- avis conforme du CSE en amont des demandes d’aides publiques et en aval de leur utilisation ; droit à l’expertise ad hoc financé à 100 % par l’employeur sur les demandes et l’utilisation des aides publiques ;
- rescrit Inspection du travail à disposition du CSE sur la conformité de la BDESE en matière d’aides publiques.